L’hypothèse avait été évoquée, mais jamais l’expérience
ne l’avait confirmée. D’après leur
étude, des chercheurs américains supposent
que les protéines bêta-amyloïdes caractéristiques
de la maladie d’Alzheimer s’apparenteraient à des
prions et coloniseraient progressivement le cerveau.
Cela bouleverserait notre vision de la maladie mais
aussi la façon dont nous devrions la traiter.
Et si la maladie d’Alzheimer n’était pas tout à fait
celle que l’on pensait ?
C’est l’idée qui ressort d’un
travail publié par des chercheurs de l’University of
California de San Francisco (UCSF). L’étude publiée
dans les Pnas montre comment la protéine bêtaamyloïde
défaillante se propage dans tout le cerveau
à la manière d’un prion, comme cela se produit dans
la maladie de Creutzfeldt-Jakob, équivalent humain
de la maladie de la vache folle.
Avant de s’aventurer plus loin dans les explications
de cette découverte, rappelons en quoi consiste un
prion. Il s’agit d’une protéine qui se comporte comme
un agent infectieux. Elle adopte une structure tridimensionnelle
incorrecte et induit la déformation
chez toutes les nouvelles protéines identiques qui
sont produites. Les cellules dans lesquelles les prions
s’accumulent finissent par mourir.
Dans cette recherche, la protéine incriminée est la
bêta-amyloïde (BA), dont l’agglomération dans les
neurones est un marqueur de la maladie d’Alzheimer.
Les béta-amyloïdes contaminent tout le
cerveau
Les chercheurs ont injecté dans un côté du cerveau
des BA synthétiques mal conformées et fluorescentes
à des souris génétiquement modifiées pour
exprimer un précurseur de l’amyloïde humaine.
Ainsi, ils pouvaient localiser la protéine. Après environ
300 jours, les BA s’étaient propagées à tout
l’encéphale, de manière similaire à ce qu’on observe
dans la maladie d’Alzheimer, alors que les souris
n’étaient pas affectées à l’origine par la pathologie.
Les résultats se sont montrés plus flagrants quand,
à la place des protéines de synthèse, ce sont des BA
extraites du cerveau des animaux malades qui ont
été introduits dans d’autres souris. La vitesse de
progression s’est révélée encore plus importante.
Pour les chercheurs, le constat paraît clair : les bêtaamyloïdes
mal conformées modifient la structure
tridimensionnelle des BA nouvellement produites
par la cellule et colonisent peu à peu les neurones
alentour. Exactement comme le fait un prion.
Prion ou pas prion ? Telle est la question.
Cette idée n’est pas nouvelle. Mais elle était restée
à l’état d’hypothèse car aucun travail n’était venu
en apporter des preuves. Celui-ci amène donc les
premiers éléments concrets qui permettent de la
justifier… mais pas encore de la valider, car il reste
quelques points en suspens.
Premier point, les chercheurs ignorent encore la
structure tridimensionnelle de la forme synthétique
injectée. Ils ne savent pas non plus quelle est son
implication exacte, ni celle de l’AB purifiée extraite
depuis les cerveaux des souris affectées… On ne peut
en effet pas encore parler de souris malades car les
effets d’une telle contagion sur le comportement
n’ont pas été étudiés. Cela fera l’objet d’investigations
ultérieures.
Second point, il est encore un peu tôt pour parler de
prion, car il existe au moins une autre explication
plausible. Les protéines injectées peuvent moduler
les taux de production ou d’élimination des BA
cellulaires, ce qui résulterait en une accumulation
susceptible de devenir fatale au neurone.
Il faut désormais approfondir les connaissances
dans ce domaine car si un prion était responsable
de la maladie d’Alzheimer, il faudrait revoir notre
façon d’aborder la pathologie, aussi bien d’un point
de vue préventif que thérapeutique. Pour l’heure,
en attendant d’en savoir plus, rassurons-nous en
nous disant qu’aucun signe de transmission d’un
individu à l’autre n’a été constaté.
Commentaires